Au nord de Sumatra, un groupe inconnu, les Kalasan Batak

JEAN PAUL BARBIER-MUELLER

Les Batak sont connus de longue date. Sans les nommer, le géographe Claude Ptolémée mentionne leur port de Barus ou Baros, sur la côte de l’océan Indien, d’où sont exportés du camphre, réputé le meilleur, ainsi que du benjoin. Marco Polo fait allusion à ces « anthropophages » du nord de Sumatra. Dès le XVIe ou XVIIe siècle, ils se procurent des armes à feu, élèvent des chevaux et commercent avec les navigateurs hollandais et portugais. Ils inventent une écriture en s’inspirant du vieux javanais, lui-même dérivé du sanscrit. Leurs villages sont des entités politiques indépendantes, sans cesse en guerre avec le voisinage, d’où un cannibalisme restreint à des actes symboliques. Ils sont divisés en six grands groupes, dont le plus important, les Toba, vit autour du lac éponyme situé sur un cratère volcanique. Les Karo nordiques et les Toba centraux ont été minutieusement étudiés, à la différence des Pakpak occidentaux. L’un des cinq sous-groupes pakpak, les Kalasan, était lettre morte pour l’ethnologie.

Entre 1974 et 1999, l’auteur a fait maints séjours à Sumatra. En sa qualité d’historien, il a reconstitué la généalogie de nombreux clans, ce qui lui a permis de dater approximativement des sarcophages de pierre, par exemple. Entre 1985 et 1999, il a découvert les Kalasan et les a mentionnés dans un livre paru en 1999. Il présente aujourd’hui en détail cette fraction des Pakpak, dont les cinq clans ont tous été fondés par un ancêtre toba au XVIe siècle. Les Kalasan ont adopté des Pakpak l’incinération des ossements des morts et la confection d’effigies ancestrales équestres en pierre. Des Toba, dont ils se sont séparés tout en maintenant de bonnes relations avec eux, ils ont gardé les règles de la coutume d’origine divine, l’adat. Une étude préalable de la mythologie, de la religion ainsi que de l’organisation sociale et politique des Toba est donc nécessaire pour présenter ce peuple peu connu : les Kalasan.