Lancement de l’ouvrage de l’anthropologue Jean-Pierre Jacob,
publié par la Fondation culturelle Musée Barbier-Mueller
Le 24 novembre 2022 de 19h à 21h
Maison de la Paix, 2 chemin Eugène-Rigot, 1202 Genève, Salle S 8 (Pétale 1)
en présence de Yao Wuobesa Issouf et Tiaho Noumaso, représentants du peuple winye invités à Genève par la Fondation culturelle Musée Barbier-Mueller
Entrée libre
Présentation du livre
Les Winye constituent un groupe ethnique récent, habitant une vingtaine de villages sur une faible envergure spatiale. À la fin du XVIIe siècle, ce peuple a adopté sa forme et son espace d’implantation actuels au centre-ouest du Burkina Faso, à partir de bribes de populations diverses (gurunsi et non gurunsi, dagara, bwaba, marka, sisala, nuni, peul, puguli…), selon une logique de « société de la frontière » (Kopytoff). Ces populations sont venues avec des coutumes différentes, voire parfois incompatibles, que le nouveau groupe ethnique en construction a dû réorganiser afin d’interagir de manière relativement harmonieuse et de répondre de manière coordonnée aux événements sanctionnés socialement comme la naissance, l’alliance ou la mort.
Ce livre propose une réflexion anthropologique sur le jeu des temporalités dans les opérations rituelles directement lié à la genèse sociétale en question, en s’arrêtant d’une part sur le rituel comme inversion ou télescopage temporel et, d’autre part, sur le rituel comme réitération. De manière apparemment paradoxale, le rituel comme inversion ou télescopage temporel se tient toujours après l’événement qu’il est pourtant censé favoriser ou sanctionner. Cette temporalité est censée permettre aux virtualités inscrites dans le destin prénatal de la personne objet du rituel de se développer pleinement avant qu’elle ne soit consacrée ou qu’on lui rende hommage, parfois plusieurs générations après sa mort effective. Le rituel comme réitération correspond aux répétitions des séquences rituelles – enrichies de modifications d’un événement à l’autre – c’est à dire des « manipulations d’objets, déploiement de gestes et production de paroles » (Lévi-Strauss) qui s’étendent entre les funérailles fraîches et les levées de deuil. Chaque hommage exprime le point de vue d’un groupe de parenté spécifique qui célèbre le ou la défunt-e sous la relation particulière qu’il entretenait avec elle ou lui, l’accumulation quantitative de rituels aboutissant à installer des qualités différentes pour les défunt-e-s célébré-e-s et des états nouveaux pour la société qui leur survit.
À propos de l’auteur
Jean-Pierre Jacob est anthropologue et professeur honoraire à l’Institut des Hautes Études Internationales et du Développement. Ses intérêts portent depuis très longtemps sur les études des interventions de développement et de la production du service public à l’échelle locale en Afrique de l’Ouest, les questions foncières et l’ethnographie de la société winye du centre-ouest du Burkina Faso, pour laquelle il mène des enquêtes depuis 1983. Il a été notamment chercheur invité au Program of African Studies (Northwestern University), et directeur de recherche du Laboratoire Citoyennetés (Ouagadougou, 2003-2008). Il est membre associé du Pôle de recherche sur le foncier rural dans les pays du Sud (Agropolis, Montpellier). Il est l’auteur, entre autres, de Terres communes, terres privées. Gouvernement de la nature et des hommes en pays winye, Burkina Faso (IRD éditions, 2007) et Comprendre la trajectoire des interventions de développement (AFD Editions, 2019, avec P. Lavigne Delville).